la Ronde du papier timbré
Traduction A
la
Ronde du papier timbré
Que se passe-t-il en Bretagne ?
Quantité de bruit et de fumée.
Le grand cheval boiteux du roi
A été ferré, il y a quelques jours
Il emmène en Basse-Bretagne
Le papier timbré et le sceau.
Le roi de France a six capitaines
Pour chevaucher sa haquenée
Deux sur la selle, deux sur le cou,
Et deux autres sur l'extrémité de la croupe.
L'armée française est bien
légère !
Moins de cent livres sur nos balances !
Le premier porte le drapeau
Et la fleur de lys du poltron.
Le second porte une épée
rouillée
Qui ne ferait pas de mal à une mouche.
Le troisième égratigne la
bête hideuse
Avec des éperons de paille.
Le quatrième porte deux plumes :
Une plume sur son chapeau
Sur son chapeau de capitaine,
Une autre derrière l'oreille.
Le cinquième garde les
ingrédients :
Le papier timbré et une bourse vide
Car la bourse du roi
Est profonde comme la mer,
Comme l'enfer toujours ouvert.
Le dernier des six capitaines
Est vêtu comme un postillon.
Comme le harnachement royal est beau !
Belle noblesse ! Belle armée !
Quand ils arrivèrent dans notre pays
En apportant le papier timbré,
Ils étaient vêtus de guenilles
Et maigres comme les feuilles mortes.
Ils avaient des longs nez, avaient les yeux
écarquillés
Les joues blanches et nues,
Les jambes comme des échalas,
Les genoux comme des têtes de biche !
A peine étaient-ils installés
Que ces six messieurs avaient bien changé :
Riches vêtements de velours,
Bas de soie, hommes tous brodés.
Nos six croquants portaient
De belles épées
à pommeau
d'ivoire
Après être resté quelques temps,
Leur mine avait bien changé :
Visages pleins et nez vineux
Yeux rieurs,
Ventre épais
comme des barriques :
Ainsi étaient nos six huissiers,
Pour les porter jusqu'à Rennes,
On creva six chevaux de trait
Avant qu'ils ne viennent
Apporter le papier timbré dans notre
région
Jean Kouer vivait aux champs,
Heureux et tranquille.
Quand ils revinrent chez eux,
Notre région était ruinée.
Nos bourses s'étaient vidées
Pour remplir ces gars.
Mes amis, ce que disent les vieux est vrai :
Du temps de la duchesse Anne,
on ne nous traitait pas ainsi !
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la Ronde du papier timbré
Traduction B8-b
la Ronde du papier timbré
Qu’elle
nouvelle en Bretagne?... Que de bruit! que de
fumée!
Le cheval du roi, quoique boiteux,
vient d’être ferré de neuf;
Il va porter en Basse-Bretagne le
papier timbré et les scellés.
Le roi de France a six capitaines, bons gentilshommes, gens de
grande noblesse;
Le roi de France a six capitaines
pour monter sa haquenée.
Deux sont en selle, deux sur le cou, les deux autres sur le bout
de la croupe.
Légère armée qu’a le roi de France!
Dans notre balance, elle ne pèsera pas cent livres!
Le premier porte le pavillon et la fleur de lis du poltron;
Le
second tient une épée rouillée qui
ne fera grand mal à personne;
Le troisième a des éperons de paille pour
égratigner la sale bête;
Le
quatrième porte deux plumes, l’une sur
son chapeau de capitaine;
L’une sur son chapeau de capitaine et l’autre
derrière l’oreille.
Avec le
cinquième viennent les herbes de malheur : le
papier timbré, la bourse vide,
La bourse du roi,
profonde comme la mer,
comme l’enfer toujours béante! Enfin le
dernier tient la queue
et conduit le cheval en
poste. Quel équipage a le roi !
Quelle noblesse! quelle armée !
Or, à leur première arrivée,
avec leur timbre, en ce pays,
Ils étaient vêtus de haillons et maigres
comme des feuilles sèches;
Nez longs, grands yeux, joues pâles et décharnées ;
Leurs jambes étaient des bâtons de barrières,
et leurs genoux des nœuds de fagots;
Mais ils ne furent pas longtemps au pays
qu’ils ne changèrent, nos six messieurs;
Habits de velours à passementeries, bas de soie et
brodés encore!
Nos six croquans s’étaient même acheté chacun
une épée à garde d’ivoire.
En bien peu de temps, dans nos cantons,
ils avaient changé de manière d’être.
Face arrondie, trogne avinée,
petits yeux vifs et égrillards,
Ventres larges comme des tonneaux,
voilà le portrait de nos six huissiers :
Pour les transporter jusqu’à Rennes,
on creva six chevaux de limon !
Lors de leur arrivée
première, avec leur timbre, en ce pays,
Jean
le paysan vivait aux champs tout doucement, bien tranquille,
à l’aise.
Avant
qu’ils s’en retournassent chez eux, il y
avait eu du trouble dans nos quartiers;
Il en
avait coûté à nos bourses
de faire requinquer ces gaillards!
Mes amis, si ce
n’est pas faux ce que racontent les vieillards, Du
temps de la duchesse Anne, on ne nous traitait pas ainsi
!
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