Le comte de Boiséan, gouverneur de Morlaix, ne s'y trompe pas en écrivant, le 26 juillet, au marquis de Montgaillard : "Je crois que s'y pouviez gagner leur chef ou lui faire couper la gorge, tout ce parti se réduirait en fumée". 

Le Balp - Montgaillard, une relation ambigüe


Sébastien Le Balp, avait été le notaire de Renée-Mauricette de Ploeuc, marquise du Tymeur5 après que son père, M. de Ploeuc, l'eut envoyé étudier le droit à Nantes. La marquise du Tymeur épouse Charles de Percin, seigneur de Montgaillard en 1662. Celui-ci comprend les doléances des révoltés et n'est pas entièrement opposé à leurs revendications.

Le marquis de Montgaillard a dissuadé les révoltés de marcher sur Morlaix. (Certes, une nouvelle ville serait à nouveau raliée aux Bonnets rouges, mais en fragilisant la défense du port de Morlaix la marine "hollandaise" pourrait accoster, la lutte anti-fiscale et antiseigneuriale deviendrait une lutte ouverte contre le roi qui était en guerre contre les "hollandais". Le Balp ne prit pas la décision de marcher sur Morlaix.)

Sébastien Le Balp continue ses relations avec le marquis de Montgaillard. En effet, les troupes royales sont en route pour la Bretagne. Pour avoir une influence sur le roi et éventuellement  résister aux troupes royales, il est évident qu’il faut un homme apprécié du roi et un professionnel de la guerre2. Or Charles de Percin, marquis de Montgaillard, fut Colonel du régiment de Champagne et officier des Mousquetaires du roi6. Le roi l'a remercié  le 28 mars 1671 en élevant les Montgaillard au rend de marquis. De plus, Charles de Percin n'était pas hostile aux revendications des révoltés5 et Le Balp, leur chef, avait été le notaire de son épouse Renée-Mauricette de Ploeuc, marquise du Tymeur5. Le Balp espérait convaincre le marquis Charles de Montgaillard de plaider leur cause auprès du roi et de les conseiller militairement pour résister aux troupes royales demandées par le duc de Chaulnes4,12.


Sébastien Le Balp est tué au château de Tymeur à Poullaouen

Arrivé au manoir du Tymeur le 2 semptembre 1675 au soir, avec 2000 hommes, Sébastien Le Balp s'isole pour s'entretenir avec les marquis Charles et Claude de Montgaillard et tenter de les rallier à leur cause2,4.

Laissant les marquis au manoir, Le Balp rejoint ses hommes et fait sonner le tocsin. 30 000 hommes  se mettent en marche dans le but de se regrouper le soir du 3 septembre à Poullaouen. Le Balp compte ensuite marcher sur Carhaix et Quimper, puis s'il le faut, affronter les troupes du duc de Chaulnes qui venaient d’être envoyées en Bretagne pour mater la rebellion2.

Le Balp revient au manoir du Tymeur dans la nuit du 2au 3 septembre 1675. Mais le frère ainé de Charles, Claude de Montgaillard, fidèle au roi Louis XIV qui l’a fait marquis quatre ans plus tôt (1671), tue par surprise Sébastien Le Balp d'un coup d'épée à travers le corps. Les marquis de Montgaillard parviennent ensuite à s'enfuir du manoir en semant la confusion chez les Bonnets rouges décontenancés par la mort de leur meneur.2,4,12,5

En représailles du meutre de Le Balp, le manoir du Tymeur en Poullaouen et ses archives sont pillés  et en partie brulé 2,4,12,5.

Privé de leur chef, les 30 000 hommes qui se concentraient à Poullaouen selon le plan prévu, se dispersent4...

Le Balp devient un martyr de la liberté armorique


La mort et l'enterrement du meneur Sébastien Le Balp n'est pas suffisant pour le roi. Son corps est exhumé. On fait un procès à son cadavre qui est ensuite traîné sur une claie, rompu et exposé sur une roue2. Il est décapité puis son corps est enterré à l’église de Kergloff tandis que son crâne est recueilli à la chapelle de Saint-Drézouarn (Kergloff).

Le Balp devient un martyr de la liberté armorique et un symbole d’une lutte pour l'égalité entre les classes. Les bretons appelaient "liberté armorique" les privilèges de la Bretagne en vertu du traité d'union de la Bretagne et de  la France.

En l'absence de rébellion organisée, les troupes royales reprennent en main toutes les paroissent et se voient opposer que peu de résistance.


Bibliographie

  • Yann Brekilien, Prestiges du Finistère, éd. France-Empire
  • Yann Brekilien, Histoire de la Bretagne, éd. France Empire, 2004 (grand nombre d'éditions antérieures sur 30 ans) (ISBN 270480947X)
  • Alain Croix, « La révolte des bonnets rouges : De l'histoire à la mémoire », in Ar Men (nº 131, novembre-décembre 2002)
  • Alain Croix, « Bonnets rouges, une révolte rurale », in canal-u.tv (réalisation en 1997 par Patrice Roturier)
  • Yvon Garlan, Claude Nières, Les Révoltes bretonnes. Rébellions urbaines et rurales au XVIIe siècle, Nières éditions Privat, Toulouse, 2004
  • Claude Péridy, Sang bleu & Bonnets rouges, Le meurtre du marquis de Montgaillard, Edition Keltia graphic Kergwenn 29540 Spézet, 2007
  • Armand Puillandre, Sébastien Le Balp - Bonnets Rouges et papier timbré, Éditions Keltia Graphic - Kan an Douar, Landelo-Speied, 1996
  • Secher, Reynald/ Le Honozec, René (éds.) (1991, 2e édition 1999): Histoire de Bretagne. 1532-1763. tome 4, Noyal-sur-Vilaine, Éditions Reynald Secher, coll. Mémoire du Futur

Notes et références

  1. Site de la Mairie de Kergloff en 2010 http://www.kergloff.fr/cadre1histoire.htm
  2. Erwan Chartier Page consacrée aux Bonnets rouges
  3. Alain Croix, Professeur d'histoire moderne "Bonnets rouges, une révolte rurale" in canal-u.tv (réalisation en 1997 par Patrice Roturier)
  4. Yann Brekilien "Histoire de la Bretagne" p237 à 239
  5. Montgaillard (Tarn-et-Garonne) marquis, époux de la marquise de Ploeuc en Tymeur voir paragraphe "Personnalités liées à la commune"
  6. L'ouvrage officiel de la famille Percin, dont les descendants ont fait paraître la dernière mise à jour en février 2002, sous le titre La Famille de Percin... de la bataille d'Hastings à nos jours
  7. Site de la Mairie de Carhaix en 2010 : "Carhaix des origines à nos jours" page 6

  8. Le code dit «paysan» (1675) : traduction du breton du"Règlement fait par les nobles habitants des 14 paroisses".
  9. Sophie Desplanques, Journaliste "1675. La révolte du papier timbré"
  10. Le traité d'union de la Bretagne à la France en 1532
  11. Claude Péridy, "Sang bleu & Bonnets rouges, Le meurtre du marquis de Montgaillard" p40
  12. Madame de Sévigné, décembre 1675 in La Borderie, t. 5, p. 531
  13. Yvon Garlan, Claude Nières, "Les Révoltes bretonnes. Rébellions urbaines et rurales au XVIIe siècle" Nières éditions Privat, Toulouse, 2004
  14. Secher, Reynald/ Le Honozec, René "Histoire de Bretagne. 1532-1763. Tome 4"
  15. Wikipédia Révolte du papier timbré paragraphe "Les transactions"
  16. Wikipédia Révolte du papier timbré paragraphe "L’image des Bonnets rouges de nos jours">
  17. Alain Croix, « La révolte des bonnets rouges : De l'histoire à la mémoire », in Ar Men (nº 131, novembre-décembre 2002)
  18. Site Internet de la Communauté de communes du Poher, projet Cantana : les mots clés du Poher 4. Bonnets Rouges, paragraphe "Mémoire et héritage des Bonnets rouges"